Le monstre du couloir
A eu lieu le 18/10/2015
« C’est par ces mots que débute la pièce de David Greig.
Duck est seule pour s’occuper de son père malade, ancien biker au chômage. Face aux lourdes responsabilités qu’elle doit affronter, elle écrit et essaie de transformer sa vie en conte fantastique.
La pièce est le récit d’une journée particulièrement éprouvante dans la vie pas si ordinaire de cette adolescente.
Très vite, les mots s’incarnent sur scène et les comédiens qui racontent l’histoire de la jeune fille participent bientôt au récit – les conteurs deviennent les personnages fantaisistes que croise Duck au fil de la pièce durant laquelle vont se multiplier les rebondissements, à un rythme effréné.
A travers la peinture d’un milieu social modeste (qui n’est pas sans rappeler l’univers de Ken Loach), David Greig interroge de nombreux enjeux propres à l’adolescence sans jamais tomber dans les clichés, en portant sur ses personnages un regard tendre et plein d’humour. Réflexion sur la famille et l’héritage, Le Monstre du couloir est là, tapi dans l’ombre, comme pour nous rappeler qu’il est possible d’être l’auteur de sa vie et de ses choix – pourvu qu’on n’ait pas peur de l’autre, du monde, de soi.
Si les thèmes sont parfois durs, Greig les aborde avec humour et poésie. A la recherche permanente du décalage, il utilise des références comme le conte, le concert pop rock, les jeux vidéo, la télévision, le jeu TV ou le théâtre de boulevard pour s’amuser avec les situations et surprendre le spectateur. Désamorçant tout pathétique, l’auteur prend de la distance avec le quotidien qu’il met en scène et nous livre une histoire drôle et sensible.
Ecrite sans attribution des répliques, cette pièce singulière se rapproche d’une forme chorale et s’offre comme une partition musicale, propice à l’audace et à la liberté des comédiens. De même, la mécanique narrative de la pièce invite à toutes les inventions scéniques.
Et puis il y a la musique : comme souvent dans les pièces de Greig, elle accompagne le récit, soutient les changements de situations et d’atmosphères, et dynamise les rebondissements toujours plus nombreux à mesure que la journée progresse. Lancée comme un bolide, l’histoire s’emballe, propulsant les personnages dans une course poursuite, une échappée sauvage à moto, aussi haletante que burlesque.
Véritable concert-théâtral, Le Monstre du couloir est une pièce forte et touchante, irrésistiblement loufoque et poétique. »
Philippe Baronnet